Espagne : les fumeurs contents de pouvoir rapporter plus de cigarettes
« J’économie 2 000 euros par an », se réjouit Fanny Billot, venue acheter des cigarettes à petit prix en Espagne, à Les, commune du Val d’Aran proche de la frontière, la réglementation permettant aujourd’hui de ramener une plus grande quantité de tabac depuis un pays de l’Union européenne.
Fanny Billot et son mari ont fait 1h30 de route depuis Tarbes, dans les Hautes-Pyrénées, et repartent les sacs remplis de cartouches de cigarettes, de pots de tabac à rouler et de briquets.
« En France les paquets sont à 12 euros, ici à cinq », précise la trentenaire qui, en s’approvisionnant en Espagne, compte économiser assez d’argent « pour payer une semaine de vacances en famille à l’année ». Il est donc « hors de question » pour elle d’acheter ses cigarettes dans les bureaux de tabac français.
Avant le 29 mars dernier, les majeurs qui circulaient dans un pays de l’Union européenne pouvaient rapporter 1 cartouche (200 cigarettes), 250 grammes de tabac à fumer, 100 cigarillos et 50 cigares. Mais la règle a changé.
Se référant au droit européen, l’Hexagone a, depuis le 29 mars, supprimé cette limite. Les douanes peuvent aujourd’hui estimer qu’il ne s’agit plus d’une consommation personnelle si la quantité dépasse quatre cartouches (800 cigarettes), 1 kg de tabac à fumer, 400 cigarillos et 200 cigares.
Les fumeurs ne craignent plus de faire leur stock
Selon le propriétaire du bureau de tabac de Les, la nouvelle réglementation à changé le comportement des clients français. « Les gens n’ont plus peur. Avant, certains dépassaient les limites imposées et étaient inquiets par les contrôles. Maintenant ils sont plus sereins », explique-t-il.
Aurélie sort d’un autre bureau de tabac de Les avec un carton de cartouches de cigarette sous le bras et le sourire aux lèvres. « Je suis très contente que ce soit passé à quatre cartouches car cela me permet d’économiser des allers-retours. Je n’irai plus du tout dans les bureaux de tabac français, sauf si je n’ai pas d’autre choix », affirme la Tarbaise.
Si les fumeurs sont satisfaits, ce n’est pas le cas des buralistes, à l’image de Annie Vigo, qui travaille à huit kilomètres de la frontière espagnole, à Bagnères-de-Luchon (Haute-Garonne). La commerçante, qui fait « moins de chiffre » au fil des ans et de l’augmentation constante du prix des paquets en France, fulmine contre cette nouvelle réglementation.
Une contrebande alimentée
« Ils veulent la mort des buralistes français. On augmente les prix pour que les gens ne fument pas, mais ils peuvent acheter moins cher et en volume à dix kilomètres », s’insurge Annie Vigo, avant d’ajouter que la nouvelle norme « provoquera plus de contrebande. On vend le paquet à 12 euros, de l’autre côté de la frontière il en coûte cinq. Cela peut rapporter à certains ».
La président de la Fédération des buralistes Frédéric Pailhe partage ce constat. Lors d’une récente opération de filtrage, il a recensé « 38 personnes qui ramenaient bien plus que quatre cartouches, en pleine semaine ».
Frédéric Pailhe, qui rappelle que le nombre de buralistes français est passé de 34 000 dans les années 2 000 à 25 000 aujourd’hui, principalement à cause de la hausse des prix, s’inquiète « de la perte énorme » provoquée par le nouveau quota.
« On a déjà une baisse de volume et forcément l’Etat va aussi perdre énormément (au niveau des taxes sur le tabac, NDLR). C’est contre-productif », conclut-il.